Guédiguian ou l’Estaque rivé au coeur

L’Humanité
Mercredi 13 Mars 2013

Guédiguian ou l’Estaque rivé au coeur

Un beau livre de Christophe Kantcheff vient de sortir sur le cinéaste
né dans ce quartier de Marseille.

de Christophe Kantcheff.

Éditions du Chêne, 272 pages, 35euros.

Robert Guédiguian, cinéaste,

«Guédiguian, cinéaste de l’Estaque», un lieu commun que Christophe
Kantcheff (1) va s’employer à explorer, miner, déminer et déployer au
fil des pages de l’ouvrage qu’il consacre au réalisateur. Le livre
fait, au contraire, la part belle à la multiplicité inventive des
identités de l’homme et du créateur, à tout ce qui enrichira sa
démarche artistique. Depuis l’origine non contrôlée. Deux sources
paraissent ainsi pertinentes à Christophe Kantcheff. La date de
naissance de Robert Guédiguian, le 3décembre 1953, à l’Estaque en
effet, quartier de Marseille. Plus tard, sa naissance au cinéma.

Au premier plan, un premier plan, celui qui inaugure Dernier Été, que
Robert Guédiguian coréalise avec Frank LeWita. Un ouvrier en tenue de
travail émerge de l’obscurité. C’est qu’entre-temps le jeune Robert
s’est, si l’on peut dire, construit une éducation. Celle induite par
son histoire familiale et sociale, intimement conjointe par le couple
que forment ses parents. Elle, Anne-Lise Gau, est allemande et fait
des ménages tout en s’occupant de son foyer. Le père, Grégoire
Guédiguian, vient d’Arménie. Il est électromécanicien en réparation
navale. Tout de suite donc, l’aventure et l’amour, migrations et
immigrations, luttes et espérances. Une ascendance qui, note
Christophe Kantcheff, «recoupe les tragédies du XXesiècle». Robert
Guédiguian saura plus tard les faire surgir du plus profond du
quotidien de ce que l’on appelle «les petites gens», avec la haute
idée qu’il se fait du peuple. Le public de ses films reconnaît là sa
signature. Elle ne paraphe pourtant aucune prédestination.

Guédiguian btira de ses mains l’architecture de son existence, celle
de son univers cinématographique. Il adhère au Parti communiste à la
fin des années 1960, rencontre Ariane Ascaride, son inséparable, et
puis les amis, les vrais, et enfin les plateaux de tournage. Il aura
lu Marx et Gramsci, Brecht et Aragon, en autodidacte. Christophe
Kantcheff propose à la fois un étoilement des thèmes et nécessités
d’artiste de Robert Guédiguian sans que jamais le parcours ne
s’éloigne de l’humain. Des cristallisations s’opèrent à mesure, d’un
film l’autre. Des photos, toujours de grande qualité, contribuent à
fluidifier le chemin. Au centre de l’ouvrage, un portfolio, composé
des photos de Jérôme Cabanel, revient sur le Marseille filmé par
Guédiguian, interroge cette matière du cinéma et les modifications
apportées par le temps. Les visions se croisent en un support
d’imaginaire. Sinon, Christophe Kantcheff livre ses analyses, précise
forme, style, esthétique ou choix de montages. De ce portrait érudit
d’un cinéaste ancré dans son époque, Christophe Kantcheff délivre une
adresse limpide, à l’image de l’homme qui en est le sujet vivant.

(1) Christophe Kantcheff est rédacteur en chef de Politis. Auteur de
nombreux ouvrages, il a également réalisé le documentaire Henri Alleg,
l’homme de la question, en 2008.

D. W.

From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress

Emil Lazarian

“I should like to see any power of the world destroy this race, this small tribe of unimportant people, whose wars have all been fought and lost, whose structures have crumbled, literature is unread, music is unheard, and prayers are no more answered. Go ahead, destroy Armenia . See if you can do it. Send them into the desert without bread or water. Burn their homes and churches. Then see if they will not laugh, sing and pray again. For when two of them meet anywhere in the world, see if they will not create a New Armenia.” - WS