Mitterrand aurait dit oui a la Constitution

La Croix , France
15 octobre 2004

Mitterrand aurait dit oui à la Constitution . FACE AUX CHRETIENS.
Interview. Le député Jean-Louis Bianco estime qu’un non du PS
mènerait à une catastrophe

AUTEUR: CASTAGNET Mathieu,PAUGAM Jacques,POURBAIX Aymeric

TEXTE-ARTICLE:

Député PS et président du conseil général des
Alpes-de-Haute-Provence, Jean-Louis Bianco était l’invité de
l’émission Face aux chrétiens animée par Jacques Paugam. Il répondait
aux questions d’Aymeric Pourbaix (Radio-Notre-Dame) et Mathieu
Castagnet (La Croix).

Etant donné les déchirements du PS sur l’Europe, craignez-vous une
explosion du parti ?

Jean-Louis Bianco : Non, le parti survivra à ce référendum quel qu’en
soit le résultat, et même si le score est serré. Personne ne veut
recommencer les erreurs énormes du congrès de Rennes, où cela avait
été une bataille de personnes et pas de ligne politique. Ce sera une
bataille difficile, mais j’espère que nous allons continuer à nous
respecter les uns les autres.

– Vous étiez proche de Laurent Fabius et pourtant vous défendez le
oui au traité. Ce référendum va-t-il conduire ainsi à de nombreux
reclassements dans le PS ?

– On m’a toujours dit proche de Laurent Fabius, et il n’y a aucune
honte à cela, mais cela n’est pas exact. Je n’étais ni l’homme de
Laurent Fabius hier ni ne suis l’homme de François Hollande
aujourd’hui, j’ai toujours été libre. Tout le monde dit que la
direction du parti n’est pas en jeu… avec des arrière-pensées. On
verra. Je pense que si le non l’emporte, il y aura redistribution des
cartes.

– François Hollande ne pourrait plus rester à la tête du PS ?

– Cela lui serait très difficile.

– L’héritage européen de François Mitterrand est revendiqué par ceux
qui soutiennent la Constitution européenne comme par ceux qui la
refusent. Vous qui avez été durant neuf ans son secrétaire général à
l’Elysée, que pensez-vous qu’il aurait répondu ?

– Ce n’est pas convenable de faire parler les morts, mais puisque
vous me posez la question, je vous réponds que je n’ai aucun doute
sur le fait qu’il aurait dit oui. François Mitterrand a toujours dit
que la construction européenne était un compromis, un combat. Il
était européen depuis 1948, et a toujours dit qu’il avait voté tous
les textes européens alors même que les socialistes se sont parfois
divisés. Comme je pense que ce traité est sur le fond meilleur que
les précédents, alors je n’ai pas de doute.

– Le traité actuel vous semble donc satisfaisant ?

– Beaucoup de choses manquent dans ce texte, comme l’harmonisation
fiscale ou des avancées sociales. Mais l’alternative n’est pas entre
ce traité et le traité que nous, socialistes français, aurions écrit,
à supposer que nous soyons tous d’accord. C’est entre ce qui est là
et ce que nous avions avant. Si nous allons dans la crise, comme le
veulent certains partisans du non, alors je prédis une catastrophe.
Je ne vois pas par quel miracle les gouvernements de droite et
Jacques Chirac nous feraient une Europe plus sociale, voire
socialiste.

– L’adhésion de la Turquie à l’Union européenne ne devient-elle pas
inéluctable dès l’ouverture des négociations ?

– Nous sommes, il est vrai, embarqués dans un processus, mais il
n’est écrit nulle part que l’ouverture des négociations vaut
conclusion. Même si les Turcs ont fait des pas considérables, il leur
reste des pas non moins considérables à faire, au-delà même de la
reconnaissance du génocide arménien.