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Le Figaro, France
20 juillet 2004

La droite est en majorité contre et les socialistes plutôt pour

Une question qui divise la classe politique française

La droite française est, dans l’ensemble, opposée à l’entrée de la
Turquie dans l’Union européenne, malgré le fait que Jacques Chirac se
soit prononcé à plusieurs reprises en faveur d’une telle éventualité.
Au PS, on se dit plutôt favorable à une adhésion, mais plusieurs
responsables expriment des réserves.

Saïd Mahrane
[20 juillet 2004]

L’UMP dit non malgré Chirac

L’UMP s’est prononcée de façon «unanime», début avril, contre
l’entrée de la Turquie dans l’UE. Alain Juppé, alors président du
parti, avait souhaité «qu’on n’engage pas de discussion avec la
Turquie à la fin de l’année (…) car elle n’a pas vocation à y
entrer sous peine de dénaturer l’UE». Il propose toutefois un
«partenariat privilégié» avec la Turquie. L’UMP n’a donc pas hésité à
prendre ses distances avec Jacques Chirac qui, de longue date,
insiste sur la vocation de la Turquie à entrer un jour dans l’Union.
Le 29 juin dernier, depuis Istanbul, le chef de l’Etat a une nouvelle
fois jugé «souhaitable» la présence de la Turquie : «Ma conviction
est que la Turquie a une vocation européenne (…) Toute l’histoire
des siècles passés en témoigne, son destin a toujours été
profondément lié à celui de l’Europe», a estimé le président de la
République. Une déclaration que «déplore» vivement Nicolas
Dupont-Aignant (UMP), président du club souverainiste Debout la
République. Pour lui, cette déclaration de Jacques Chirac est «très
inquiétante et semble totalement sourde à l’opinion des Français, qui
s’opposent dans leur très large majorité à cette adhésion». À propos
de cette divergence, Alain Juppé a fait valoir que ce n’était pas un
«drame». Et il reprend à son compte la fameuse formule de l’ancien
premier ministre Laurent Fabius lorsque celui-ci avait été en
désaccord avec François Mitterrand : «Lui, c’est lui, moi, c’est moi.
C’est une formule qui peut resservir», a expliqué Alain Juppé.

L’UDF est contre
«Si on veut faire de l’Europe un ensemble unitaire qui agisse sur la
scène du monde, il ne faut pas la construire sur une trop grande
hétérogénéité», souligne le président de l’UDF, François Bayrou, pour
expliquer son opposition à l’entrée de la Turquie.

Le MPF dénonce «une plate-forme du terrorisme»

Le président du Mouvement pour la France, Philippe de Villiers,
s’oppose fermement à l’entrée de la Turquie dans l’Union. Il en avait
fait son cheval de bataille lors des dernières européennes : «Elle
est la plate-forme du terrorisme, des mafias, de la drogue et de
l’immigration clandestine ; elle a une frontière commune avec
l’Irak», dit-il.

Le FN opposé à l’entrée d’un «pays d’Asie»

Le président du Front national, Jean-Marie Le Pen, estime que la
Turquie ne peut pas entrer dans l’UE pour des raisons «historiques,
géographiques, politiques, morales et religieuses». Le leader
frontiste ajoute que la Turquie n’est «pas un pays européen mais un
pays d’Asie, et de moins en moins laïque».

Le «oui mais» du PS

Le PS se dit globalement favorable à l’entrée, à terme, de la Turquie
dans l’Union, mais plusieurs responsables du parti abordent le sujet
avec la plus grande prudence. Ainsi, François Hollande, premier
secrétaire, estime que, «pour le moment, les conditions ne sont pas
réunies». Le «bon débat», selon lui, porte sur la «frontière de
l’Europe» et sur la «reconnaissance du génocide arménien» : «Arrêtons
d’avoir des élargissements par petits paquets sans aucune logique,
sans transparence à l’égard des opinions publiques.» Laurent Fabius,
quant à lui, recommande aux socialistes de «ne pas se presser».

Pierre Moscovici, le plus turcophile des socialistes, reconnaît que
l’adhésion de la Turquie est «une affaire d’au moins une génération».
Pour Michel Rocard, «la Turquie doit appartenir à l’Europe. Jacques
Chirac a engagé sa signature. Ce pays a fait un bond en avant en
matière de démocratie, a supprimé la peine de mort (…) Elle a
encore beaucoup à faire, la balle est dans son camp», dit-il. La
nouvelle présidente de la région Poitou-Charentes, Ségolène Royal, a
eu cette formule, qui fit sourire d’ailleurs plus d’un socialiste,
pour illustrer sa position : «Les Turcs sont quand même très proches
des Grecs : pourquoi on prendrait les Grecs et pas les Turcs ?»

Les Verts sont pour
Favorable à l’entrée de la Turquie dans l’UE, Daniel Cohn-Bendit,
vice-président des Verts au Parlement européen, espère en l’entrée de
la Turquie dans l’UE : «Nous tenterons ainsi de réconcilier le monde
de l’islam avec la démocratie.» Pour Noël Mamère, la Turquie est «un
plus pour l’Europe, notamment dans nos relations avec le Sud».

From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress