Le destin tragique du peuple arménien face à l’objectif des missionn

Le Soir, Belgique
7 janv 2015

Le destin tragique du peuple arménien face à l’objectif des
missionnaires jésuites

JEAN-MARIE WYNANTS
mercredi 7 janvier 2015, 13h33

Au début du XXe siècle, la population arménienne subit une succession
de massacres menant au génocide de 1915

Ce sont des images calmes, souvent souriantes, montrant des femmes,
des enfants, des musiciens en tenue traditionnelle… A priori, rien de
grave ne surgit de ces photographies réalisées à partir de 1906 en
Anatolie et dans les régions avoisinantes.

Pourtant, on sait aujourd’hui que ces moments paisibles vont être
suivis d’événements terribles et de ce qui restera dès 1915 comme le
premier génocide du XXe siècle. Le massacre de plus d’un million
d’Arméniens, organisé par le gouvernement jeune-turc de l’Empire
Ottoman.

que l’on peut voir un peu partout à l’occasion de multiples
expositions et commémorations. Ici, pas de tranchées, pas de combats,
pas de cadavres. Les photos du génocide arménien sont très rares et ne
sont pas au coeur de cette collection.

On découvre plutôt les images prises avant et après ces moments
tragiques. L’avant montre la vie quotidienne, l’après met en évidence
une série de personnalités qui vont tenter de reconstruire une nation
arménienne, de fédérer différents mouvements, d’empêcher que le monde
oublie et passe à autre chose.

Ces images ne sont pas l’oeuvre de reporters envoyés sur place pour
témoigner. Elles ont été prises par des missionnaires jésuites
installés dans la région dès 1881. Leur but : répandre la foi
chrétienne. Et pour cela, les missionnaires s’appuient notamment sur
un réseau d’écoles et d’hôpitaux. Une organisation efficace mais qui
nécessite des fonds pour lesquels on fait appel à la générosité des
fidèles.

Appel à la générosité

Jusque-là, les missionnaires envoyaient des témoignages écrits pour
sensibiliser les futurs donateurs. Mais la photographie vient tout
bouleverser. Elle s’avère bien plus efficace que de longs discours
pour montrer à quoi sert l’argent récolté. Les Jésuites réalisent donc
de grands portraits de groupe des enfants fréquentant leurs écoles.
Beaucoup se contentent de prendre quelques photos qui seront ensuite
publiées dans les revues catholiques en Europe. Mais certains ont une
vraie passion pour cette pratique, comme Antoine Poidebard, dont on
découvre ici plusieurs images et qui, par la suite, inventa la
photographie aérienne d’archéologie en Syrie.

Conservés dans les très riches collections de la Bibliothèque
orientale de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth, ces clichés sont
exposés pour la première fois en dehors de celles-ci. On n’y découvre
pas d’images tragiques témoignant du génocide mais bien ces petits
moments suspendus où la vie s’écoule simplement.

Réalisées dans un but qu’on qualifierait aujourd’hui de >,
elles prennent à un siècle de distance une autre épaisseur, une autre
signification. On ne peut en effet s’empêcher en voyant ces enfants
rassemblés devant les objectifs des missionnaires de penser que bon
nombre d’entre eux disparaîtront bientôt dans les massacres. Quant aux
larges groupes photographiés après le génocide, on sait qu’il s’agit
là d’orphelins ayant perdu leur famille dans ces mêmes massacres.

Jusqu’au 17 mai, du mardi au dimanche de 10 à 18 h, au Musée de la
photographie, 11 avenue Paul Pastur, Charleroi (Mont-sur-Marchienne).

From: Baghdasarian

http://www.lesoir.be/751503/article/culture/arts-plastiques/2015-01-07/destin-tragique-du-peuple-armenien-face-l-objectif-des-missionnaires-jesuites
www.museephoto.be.