Le Figaro, France
Vendredi 19 Mars 2010
Erdogan perturbe la normalisation avec l’ArmÃ?©nie;
Le premier ministre turc menace d’expulser des milliers d’ArmÃ?©niens en
situation irr�©guli�¨re.
AUTEUR: Portes, Thierry
CAUCASE La derni�¨re sortie du bouillant premier ministre turc, Recep
Tayyip Erdogan, vient de porter un coup s�©v�¨re � un processus de
normalisation turco-arm�©nien d�©j� bien mal en point. La r�©cente
reconnaissance du g�©nocide arm�©nien de 1915 aux ��tats-Unis et en Su�¨de
a servi de facteur d�©clenchant. Ces r�©solutions « sapent les efforts
de paix avec l’ArmÃ?©nie », a dÃ?©clarÃ?© mardi Ã? la BBC le premier ministre
turc, avant de sortir de ses gonds :
« Il y a 170 000 Arm�©niens dans mon pays. Parmi ceux-l� 70 000 sont
des nationaux, mais nous tol�©rons les 100 000 autres. Si cela �©tait
nÃ?©cessai re, je pourrais Ã?ªtre dans l’obligation de leur dire de
retourner dans leur pays. »
Le journal stambouliote Milliyet jugeait hier que « faire d’innocents
travailleurs armÃ?©niens une monnaie d’Ã?©change, des otages, est une
chose suffisamment grave pour alimenter les accusations s�©culaires
contre la Turquie ». Plusieurs autres m�©dias turcs et nombre de
diplomates �©trangers ont partag�© ce sentiment, ce qui a conduit le
parti islamo-conservateur au pouvoir � Ankara � faire machine arri�¨re,
en expliquant que M. Erdogan n’avait pas l’intention de mettre Ã?
exÃ?©cution sa menace, « ni aujourd’hui ni demain ». La vÃ?©ritÃ?© oblige
aussi Ã? dire que le nombre de clandestins d’origine armÃ?©nienne,
principalement des femmes qui font des m�©nages ou gardent des enfants,
est loin de 100 000, et g�©n�©ralement estim�© entre 10 000 et 20 000.
L’accord toujours pas ratifiÃ?©
Mais le probl�¨me se situe ailleurs, � la fronti�¨re turco-arm�©nienne,
fermÃ?&#x C2;©e depuis la guerre au Nagorny-Karabakh ou Haut-Karabakh. Entre
1988 et 1994, le conflit sur ce territoire azerba�¯djanais peupl�©
d’ArmÃ?©n iens a fait 30 000 morts et des centaines de milliers de
r�©fugi�©s. Par solidarit�© avec les turcophones azerba�¯djanais, la
Turquie a rompu ses relations avec l’ArmÃ?©nie. Le contentieux entre les
deux pays, nourri par la question, toujours officiellement taboue Ã?
Ankara, du gÃ?©nocide armÃ?©nien par l’Empire ottoman en 1915, n’avait
cependant pas empÃ?ªchÃ?© ceux-ci de signer un protocole d’accord sur la
r�©ouverture de la fronti�¨re en octobre 2009.
Cependant, ce texte n’a toujours pas Ã?©tÃ?© ratifiÃ?© par les parlements
turcs et arm�©niens, et le rapprochement entre les deux pays est
aujourd’hui au point mort. C’est le fond du problÃ?¨me. La
reconnaissance du g�©nocide arm�©nien par une commission du Congr�¨s
am�©ric ain, qui ne pr�©sage en rien de son acceptation par la Chambre
des reprÃ?©sentants, n’est qu’un motif d’agacement supplÃ?©mentaire.