Entretiens avec Gerard Chaliand, poete et gentleman baroudeur

Le Monde, France
1 janvier 2008 mardi

Radio;
Entretiens avec Gérard Chaliand, poète et gentleman baroudeur

L’émission de France-Culture " A voix nue " donne la parole, toute la
semaine, à ce spécialiste de géostratégie

Voyageur, spécialiste de géostratégie, auteur de plusieurs dizaines
d’ouvrages individuels ou collectifs, Gérard Chaliand parcourt le
monde depuis son plus jeune ge. Sur France Culture, l’émission " A
voix nue " lui donne la parole toute la semaine, au fil de cinq
entretiens avec Thierry Garcin, le responsable des " Enjeux
internationaux " à l’antenne chaque matin.

Ce grand témoin des conflits armés de la deuxième moitié du XXe
siècle, né en 1934 dans une famille d’origine arménienne, raconte sa
vie de gentleman baroudeur, dévoreur de littérature épique à 8 ans,
docker, représentant en montres ou terrassier à 20 ans pour payer ses
voyages, puis enquêteur chez les guérilleros de Guinée-Bissau ou du
Kurdistan et enseignant invité à l’Ecole nationale d’administration
(ENA), à Harvard et à Montréal.

De l’aventurier, Gérard Chaliand a le verbe haut, le sens des
anecdotes chatoyantes et, quand il parle des institutions de
recherche, la voix cassante. Du spécialiste, l’auteur de L’Atlas
stratégique, géopolitique des nouveaux rapports de forces dans le
monde (Complexe) a la précision et la patience pour fouiller ses
sujets favoris : guérillas et guerres irrégulières, tiers-monde. LE
SON DES MOTS

L’Algérie, son voyage initial en 1952, lui ouvre les yeux sur le
colonialisme. Trois ans plus tard, la conférence de Bandung
(Indonésie), premier sommet des pays du tiers-monde, témoigne de la
marche vers les indépendances.

" C’était enthousiasmant de soutenir l’Algérie ou de soutenir Castro
à ses débuts. Quand il se rend à New York pour prononcer un discours
aux Nations unies, il loge à Harlem et défend la lutte des Noirs pour
les droits civiques ", se souvient-il. Il travaille en Guinée-Bissau,
à l’heure d’Amilcar Cabral, leader indépendantiste assassiné par les
services portugais en 1973.

Par la suite, il observe la montée des nationalismes, les phénomènes
islamistes, les nouvelles formes de guerres irrégulières. Il commence
la rédaction d’un atlas, dans les années 1990, sur le nouvel ordre
mondial, les diasporas ou le nucléaire. Il établit des anthologies
poétiques ou littéraires, pour enfants et pour adultes (Anthologie de
la poésie populaire kurde, L’Aube). Car Gérard Chaliand se veut aussi
poète et qualifie de " poème en prose " Mémoire de ma mémoire
(Julliard), son récit sur la trace de l’histoire familiale arménienne
et sur ce " caillot que j’avais dans le poing au jour de ma naissance
et dont, enfant, on m’a transmis la tragédie ". Il avoue avoir mis
vingt ans à écrire ce livre. " La poésie, le son des mots, c’est ce
qui donne un peu de sens à l’existence ", affirme-t-il.

Catherine Bédarida

" A voix nue ", du lundi 31 décembre au vendredi 4 janvier à 20
heuressur France Culture.