Turquie : justice pour Hrant Dink

NEWS Press
4 juillet 2007

Turquie : justice pour Hrant Dink

par Amnesty International

Amnesty International demande que soient pris en compte tous les
éléments ainsi que les circonstances de la mort de Hrant Dink,
journaliste turco-arménien, lors du procès des dix-huit personnes
accusées d’avoir été impliquées dans son assassinat. Ce procès
s’ouvre ce lundi 2 juillet à Istanbul. Hrant Dink a été abattu le 19
janvier 2007. L’affaire sera jugée à huis clos devant le tribunal
pénal n° 14 de Besiktas, l’un des accusés étant mineur au moment des
faits.

« Les autorités turques doivent veiller à ce que, lors de l’examen du
dossier, aucune piste ne soit négligée. Toutes les personnes
impliquées dans le meurtre de Hrant Dink – celles qui ont été
impliquées de manière active dans la planification et l’exécution de
l’agression fatale, ainsi que celles qui ne l’ont pas empêchée –
doivent être jugées, a déclaré Andrew Gardner, chargé de recherche
pour la Turquie auprès d’Amnesty International.

« Le meurtre de Hrant Dink s’est produit dans un contexte
d’intolérance à la liberté d’expression de plus en plus marqué. »

Amnesty International considère que Hrant Dink a été pris pour cible
en raison de son travail de journaliste et parce qu’il défendait la
liberté d’expression et prônait l’universalité des droits humains. Il
avait été poursuivi à de nombreuses reprises au titre de l’article
301 du Code pénal, qui rend passible d’inculpation le fait de «
dénigrer l’identité turque ». L’auteur présumé des coups de feu à
l’origine de la mort du journaliste aurait déclaré avoir tué Hrant
Dink après l’avoir entendu à la télévision tenir des propos «
dénigrant l’identité turque ».

Hrant Dink avait reçu des menaces de mort pendant plusieurs mois
avant sa mort. Il l’avait signalé au procureur général de Sisli à
Istanbul. Selon certaines informations, l’une des personnes
poursuivies en lien avec la mort du journaliste serait un informateur
de la police qui aurait averti les policiers à plusieurs reprises des
projets d’assassinat visant Hrant Dink dans les mois qui ont précédé
sa mort. Néanmoins, les autorités n’ont pas pris les mesures
nécessaires pour assurer la protection du journaliste.

Avant l’ouverture de l’enquête sur la mort de Hrant Dink, le chef de
la police d’Istanbul a fait une déclaration selon laquelle le meurtre
de Hrant Dink n’avait pas de caractère politique et n’avait pas été
organisé, mais qu’il était le fait d’un tueur isolé, mû par des
sentiments nationalistes. Amnesty International craint qu’une telle
déclaration, peu de temps après les faits, ait non seulement mis en
péril l’impartialité de l’enquête ouverte ensuite, mais illustre
aussi la réticence des autorités à prendre en compte la pleine
dimension de l’affaire.

Amnesty International est également préoccupée par les images
diffusées dans les médias, montrant des agents de la force publique
posant devant un drapeau turc avec le tueur présumé, comme s’il était
un « héros ». Ce type d’images contribue à renforcer l’idée selon
laquelle certains organes chargés du maintien de l’ordre public ne
sont pas objectifs. Bien qu’un certain nombre de fonctionnaires aient
été démis de leurs fonctions pour avoir fait preuve de négligence ou
avoir failli à leur mission, Amnesty International n’a pas eu
connaissance de poursuites engagées à leur encontre.

Amnesty International envoie un représentant à Istanbul pour le
premier jour d’audience devant le tribunal pénal.