Portrait. Julien Laupretre

La Croix
17 août 2004

PORTRAIT. Julien Lauprêtre, un demi-siècle au service des autres. ·
la tête du Secours populaire français (SPF) depuis bientôt cinquante
ans, Julien Lauprêtre fut à l’origine de la Journée des oubliés des
vacances , créée en 1979. Cette année, celle-ci est placée sous le
signe du Débarquement. 5 000 enfants sont attendus, demain, en
Normandie.

par LAMOUREUX Marine

Cinquante ans après, c’est le même enthousiasme, la même verve
militante. Entré en 1954 au Secours populaire français comme
assistant, secrétaire général dès l’année suivante, Julien Lauprêtre
est depuis lors l’me d’une des plus importantes associations
caritatives du pays. Toujours réélu à sa tête, cet homme simple, à
l’allure bonhomme, a su développer l’organisation, qui rassemble
aujourd’hui 72 000 bénévoles, plus de 800 000 donateurs, et qui
fêtera l’année prochaine son 60e anniversaire.

Pour autant, à 78 ans, le militant n’en tire aucune gloire, si ce
n’est de rendre la société un peu plus humaine . Fils de cheminot,
apprenti miroitier au début de la Seconde Guerre mondiale, Julien
Lauprêtre a rejoint la Résistance dès l’ge de 16 ans, avant d’être
arrêté puis emprisonné en 1943. C’est là, dit-il, qu’il a puisé un
profond désir de s’engager sur le terrain social, au lendemain du
conflit. Son père, qui fut syndicaliste et élu au conseil municipal
de Paris, n’y est pas étranger.

Mais la rencontre, en prison, avec les membres de l’affiche rouge ,
dont le poète et résistant arménien Missak Manoukian, aura été
décisive pour le jeune Julien. Manoukian m’a dit : moi je vais être
fusillé, mais toi, tu vas t’en sortir, il faut que tu sois utile, que
tu rendes la société moins injuste. Bien des années plus tard, le
président bénévole du Secours populaire a le sentiment d’avoir
apporté sa pierre. Aide alimentaire, dons de vêtements, accès aux
soins mais aussi à la culture : chaque jour, plusieurs milliers de
personnes défavorisées s’en remettent à son association, qui tient
tout particulièrement à la Journée des oubliés des vacances .

· l’heure actuelle, un enfant sur trois ne part pas en vacances, car
en cas de difficultés, c’est toujours sur le budget des loisirs que
l’on rogne , rappelle Julien Lauprêtre, pour qui même une seule
journée, à la mer ou à la montagne, peut apporter beaucoup. L’enfant
a des choses à raconter lorsqu’il retourne à l’école, il n’est pas
sec devant la traditionnelle rédaction de rentrée , souligne-t-il.
Demain, à n’en pas douter, le voyage de 5 000 enfants défavorisés sur
les plages de Normandie aura une consonance particulière pour
l’ancien résistant. Qui, bien loin d’être las, après cinquante ans,
n’espère qu’une chose : pouvoir continuer encore longtemps à militer.